Primordial - "Storm before Calm"
"La tempête avant le calme" : sous-entendu, "avant la mort". Car Primordial ne peut concevoir le calme qu'après avoir vaincu... ou péri. Et à entendre ces sept brûlots, on peut légitimement penser que ce sont une fois de plus ceux d'en face qui ont crié "pouni", pouce levé, échine courbée. La tempête, elle, commence immédiatement, avec ce premier titre "The heritic age" qui, sans prévis ni round d'observation, déboule à pleines foulées, lances en avant. Tel accès de violence n'est pas commun, et il faut me croire sur parole : on est ici au niveau de ce qui se fait de plus dur, un black metal sans concession et sans répit. Nemtheanga utilise d'ailleurs les codes vocaux du black le plus pur et le plus corrodé, sans néanmoins s'empêcher d'y mêler ses fameuses gueulantes rageuses. Un chorus de guitare vicieux est cependant présent pour nous rappeler à l'ordre de ce précepte mélodique cher au groupe. Violemment catchy. La suite est plus posée. Et toujours fidèle à cette utilisation critique d'éléments acoustiques d'essence folklorique, mais tellement épurés, que toute notion de racolage en est définitivement absente. D'inspiration assez proche de "Sprit the earth aflame", cet album s'en détache cependant par une approche musicale plus spirituelle des choses, moins strictement terrienne, comme avec par exemple l'aérien "Cast to the pyre". Le point commun réside en revanche dans la tension permanente qui habite les titres, le travail herculéen de Nemtheanga y étant d'ailleurs pour beaucoup. Mais les compos sont plus étirées, moins cycliques, plus portées vers des progressions d'intensité et de climat. Ce qui n'empêche pas le groupe de renouveler l'agression du premier titre sur le quatrième ("Suns first rays") qui est une balafre rythmique absolue, avec un chant ici encore acrimonieusement black de chez black. Et ici encore, le chorus de gratte qui vient imprimer la marque du groupe. Autre point commun avec "Spirit...", la présence d'un instrumental acoustique folk, qui, une fois encore, se tient à bonne distance de toute celtiquaillerie de pacotille, privilégiant en ses lieu et place une ambiance orageuse et des pensées noires. Mais si "Spirit..." était une incantation à la guerre et une chevauchée vers le champ de bataille, "Storm before calm" se déroule, lui, au milieu du champ de bataille, debout, sanguinolent, avec des successions de doute et de furie, comme lorsque, gagné par l'épuisement, on hésite entre ruade ultime et reddition. C'est peut-être cette mixité entre séquences violentes et replis stratégiques qui a pu désorienter l'auditoire du groupe. Pourtant, il s'agit d'une métaphore ô combien exacte de ce qu'est un combat.