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Chronique et review de l'album Cybion de Kalisia.

Kalisia

"Cybion"

(autoproduction -- 2009)

pochette de l'album Cybion de Kalisiaimage élargie - pochette de l'album
Kalisia - "Cybion"
13 ans après la sortie de la démo « Skies », Kalisia annonce enfin son retour tant attendu ; l'enfant prodigue revient après moult péripéties, beaucoup de mystère et une très longue expectative pour un album annoncé et tellement de fois retardé. Enfin... l'année 2009 débutera donc avec « Cybion », le premier album de Kalisia, fruit d'un labeur de longue haleine et d'une technique tout bonnement extraordinaire.
Avant de découvrir la musique en elle-même, arrêtons-nous quelques instants sur le packaging. S'il s'agit ici d'un album autoproduit, ce n'est absolument pas un handicap ; l'investissement a été de taille et proportionnel à la qualité de la musique. Cela a permis au groupe de réaliser totalement son idée de concept album et d'aller jusqu'au bout de ce dernier, en matérialisant vraiment les ambiances, les thèmes, tant par l'image que par les textes.
« Cybion » se présente sous la forme d'un digipak somptueux, dans lequel vous pourrez découvrir deux cd's. Et oui, ça valait la peine d'attendre, car non seulement vous aurez le plaisir d'entrer dans le monde futuriste de Kalisia, mais vous pourrez aussi explorer leur passé avec le cd bonus. « Origins » contient non seulement quatre reprises de formations qui ont fait partie des inspirations du groupe (à savoir Dream Theater, Emperor, Loudblast et évidemment Cynic), mais surtout, pour tous ceux qui n'ont jamais pu l'écouter, la démo « Skies ».
C'est également à travers un livret véritablement divin, mis en valeur par des illustrations d'anticipation, que le contenu du concept album se délivre à nous en nous proposant une nouvelle langue qu'est le Kal. Rien que pour la beauté de l'objet, il vaut la peine d'être possédé, et c'est grâce à une attitude telle que celle-là que, même si nous ne ferons pas reculer le fléau du téléchargement, cela incite malgré tout à continuer d'écouter des albums sur un support physique. Pour tout amateur atteint par la « collectionite aigüe » d'objets avec finitions peaufinées, c'est du nectar...
Après cette courte digression quant à la qualité du packaging, il est temps maintenant de revenir au sujet qui nous intéresse le plus : la musique de Kalisia et le contenu de ce mystérieux « Cybion ».
Comment ont-ils évolué ? Quel genre de Metal propose le groupe maintenant, quelles sont les différences avec « Skies » ?
Tout d'abord, « Cybion », c'est une histoire racontée en un seul et unique morceau, lui-même divisé en plusieurs parties faisant intégralement corps avec le reste de l'environnement futuriste de Kalisia, et qui, prises séparément, ne donneraient absolument rien alors qu'ensemble, elles se complètent et forment un seul élément . Cette chanson évolue au fur et à mesure de l'écoute et on arrive facilement à la fin des 71 minutes.
Je dis facilement car même si la chanson est tellement évolutive dans son approche et qu'il est difficile de trouver une seule mélodie unique, a contrario, il est facile de s'en imprégner et de pénétrer dans le monde de Kalisia. Les mélodies, bien que complexes, offrent une ouverture à l'auditeur. C'est la compréhension qui est plus ardue.
La diversité est le maître-mot sur cet album... On a beaucoup parlé d'influences à travers Kalisia : imaginez qu'un Ayreon vienne à la rencontre d'un Dream Theater et d'un Cynic sur un thème aussi stellaire qu'Oxiplegatz dans une idée de concept album en un seul morceau comme l'avait fait Edge of Sanity avec « Crimson » avec, en plus, des touches futuristes à la S.U.P, ou du Bal-Sagoth...
Mais ne parler que de cela serait plus que réducteur et très minimaliste pour décrire la musique de Kalisia, car Kalisia, c'est Kalisia et pas un groupe fait uniquement d'influences.
On est ici face à la crème de la musique progressive façon française aux racines plus death metal ; chacun y verra, comprendra, interprètera ce qu'il voudra... Et voici ce que j'ai vécu : un voyage à travers les galaxies Kalisiennes... Je suis parti à la rencontre de la virtuosité musicale qui s'approche de la perfection dans l'ingéniosité. Cela posera sans doute problème, pas au plus grand nombre mais peut-être à une partie considérable de l'auditoire, au niveau de la capacité d'appréhender ce type de musique. Il n'y a pas véritablement de mot pour la décrire, il faut écouter ; Kalisia, on n'en parle pas, on l'écoute...
Les débuts de l'album sont orientés vers une musique plus symphonique, comme je le disais tout à l'heure à la manière d'un Dream Theater mais aussi d'un Ayreon ; j'ai eu les mêmes frissons que j'avais eu pour « Actual Fantasy », avec cette utilisation si particulière des claviers. A ce moment de l'album on a l'impression que Kalisia a abandonné ce côté agressif qu'il avait sur « Skies » et que leur musique s'oriente dorénavant vers cette symphonie cosmique accentuée par les choeurs.
Au fur et à mesure qu'on avance, on se rend compte qu'il y a une multitude de subtilités, de détails microscopiques auxquels il faut faire attention sous peine de passer à côté ; ce sont un peu les Léonard de Vinci de la musique progressive extrême...
Les passages sur « Aspiration Above » me rappellent Cynic, mais d'autres passages sur les autres parties de l'album me sont aussi restés en tête comme un patchwork musical... J'ai entendu ou cru entendre, ou simplement peut-être imaginé entendre, à la fin d' « Awkward Decision » qui est plus agressif, des parties acoustiques à la manière d'Empyrium ou épiques comme dans la B.O de Conan, alors que le début de « Blinded addict » est plus new age avec un semblant de musique classique espagnole. « Blessed Circle » est très funky, avec des cuivres, il me semble un peu stylé Isaac Hayes dans « Shaft » mais toujours sur ce fond de Metal extrême complexe et hyper technique... Dans « Distant chronicles », on trouve la douceur de cette voix féminine accompagnant un piano plein de mélancolie; plus loin, de l'orgue à la Doors, des trucs à la Era, une basse utilisée non pas simplement comme rythmique mais comme une guitare à part entière, des percussions drum'n'bass, des paroles en français... Même sur « Down below », ce souci du détail est encore mis en exergue lorsque le mot « shadow » est susurré juste une fois sur une fin de phrase comme s'il était impératif qu'il soit là à ce moment précis. Je vous livre un peu en vrac toutes ces choses, mais les changements de rythmes, d'ambiances sont tellement nombreux qu'on y passerait des heures. On retrouve en fait la musique du monde, celle de notre planète entière unie à travers le Metal à tendance extrême. Ce n'est pas un album de Metal, c'est un album de world music qui prend en compte toute la beauté des différents courant musicaux pour les réunir sur une seule chanson progressive. Il faut toujours être attentif au moindre élément pour ne rater aucun aspect, aucune tournure de riffs, sinon on risque de perdre le fil conducteur de l'album ; et les émotions qu'on pourrait ou aurait du ressentir seront en total décalage voire même absentes.
La deuxième partie de l'album se durcit, elle progresse plus vers la brutalité tout en conservant la musicalité, mais le death metal technique se fait beaucoup plus présent qu'en début d'album.
Un des passages les plus brutaux et violents est certainement « Confined/Contender » où il s'agit là d'un death hyper rapide ; la hargne de Kalisia explose et les amateurs d'extrême seront servis. Je citerai encore un morceau qui est « Contact experience » et qui commence avec une musique martiale au possible comme nos fameux Suisses savent le faire.
Certains ne comprendront pas pourquoi autant d'engouement et d'autres seront subjugués.
Mais il n'y a aucune place pour le hasard dans cet album ; tout a été calculé avec une précision d'horloger, chaque riff, chaque segment de chant a dû être pensé et repensé des dizaines de fois avant d'arriver à un résultat satisfaisant pour le groupe.
« Blinded addict »laisse un passage réservé à la basse pour qu'elle soit bien présente et se termine avec un effet oriental futuriste.
On ne peut pas vraiment détailler car il faudrait encore des dizaines d'écoutes pour décrire; c'est comme pour une épitaphe, on ne peut parler de la vie d'une personne que le jour de sa mort, et « Cybion » n'est pas près d'être oublié dans les esprits, d'autant plus qu'il s'agit plutôt d'une naissance...
La musique de Kalisia ne s'adresse pas simplement à un public de Metalleux et encore moins de Metal extrême, elle touche tout le monde par sa somptuosité.
Il a fallu attendre 13 ans, entre les deux productions de Kalisia... Combien faudra-t-il d'écoutes pour connaître par coeur l'album ?
Car effectivement, après de longues heures qui ne furent pas interminables, loin de là, chaque nouvelle écoute ouvre une autre porte interdimensionnelle et on découvre ce que l'on n'avait pas décelé aux écoutes précédentes. Figurativement, c'est un album « vivant », mobile, qui change constamment d'aspect.
Alors, il est certain que cet album divisera énormément... Je conçois que cela puisse faire fuir un certain nombre de personnes, mais malgré cela, une pensée unique en ressort : qu'on aime ou pas, Kalisia est inventif, créatif et sa musique est transcendante.
« Cybion » redonne ses lettres de noblesse à la musique prog, mais d'une manière personnelle, façon Kalisia. Pour terminer, je vous parlerai des guests qui ont apporté leur petite contribution à l'interprétation de l'album: parmi eux, on citera Angela Gossow, Arjen Lucassen, Paul Masvidal, Ludovic Loez.....
Alors, après une si longue attente telle Pénélope se languissant de son Ulysse, laissez-vous emporter dans l'Odyssée de « Cybion »...

Arzhu Decibels Storm - décembre 2008
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